Hier, c’était un lundi. Le 3 décembre exactement.
Mais Maria n’en savait rien. Elle était sur la lune. Elle est depuis toujours un petit peu sur la lune, Maria. Peut-être parce qu’elle danse. Peut-être parce qu’elle ne peut plus danser que dans sa tête.
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Happy France
Je vais parfois dîner chez elle, tout en haut d'un immeuble haussmanien du neuvième arrondissement, dans le Paris des larges avenues mais dans une rue étroite à sens unique et pavées de menus pavés d'un gris presque noir. Le digicode ouvre un passage dans l'ancienne porte cochère monumentale…
C'est le temps des derniers. La dernière semaine, la dernière fois qu'on sera allé à la piscine, le dernier repas entre amis, le dernier jour, la dernière fois qu'on utilisera les bodyboards, la dernière soirée, la dernière photo, la dernière nuit, le dernier sms, le dernier au revoir.
Le billet d'avion acheté il y a un an servira pour de bon. Le visa s'arrête dans moins de deux jours.
Je me suis installée sur le siège P24, vide, rouge. Comme dans un train, j'ai demandé qui était sur le O20, ma place ; comme dans un train, on m'a dit que je m'étais trompée de wagon. J'étais dans la mauvaise rangée, j'y suis restée.
certains s'installent ici comme si on ne les avait pas prévenus. Ils sont passés par là un été, c'était le mois d'août, il faisait beau, ils ont eu chaud, ont dormi dans la chambre blanche et climatisée d'une maison d'hôtes chic et ont pataugé dans une piscine de la taille de leur appartement parisien. Le Ventoux, c'était sûr, c'était le paradis sur terre
Je les ai rencontrés face au mont Blanc, devant un refuge de haute montagne, en train de tirer sur les cordes d'un manche à vent orange. Sur la colline derrière nous, au-dessus des vaches et des chevaux, un tracteur rouge tournait carré dans un champ.
L'un portait des lunettes, un autre un petit sac à dos. Tous les trois étaient en t-shirts, shorts et casquettes alors que j'avais renfilé une polaire.
On est mi-juillet et il fait douze degrés
C'est sûrement pour ça qu'on mange des raclettes en plein été
Elle est à un tournant de l'histoire
Autre chose à faire que d'attendre que ça passe que regarder par la fenêtre que d'observer dans le menu la rue les autres les décisions de petits au nom de pays
Faut bien aller bosser elle se dit
Personne ira à sa place et elle veut les vacances RTT tickets resto 13 et 14e mois prime et chèque C.E. veut profiter de la vie
Ce qu'on voit en premier, avant les serviettes éparpillées, quand le chemin de bois arrive sur le sable, c'est l'alignement des pêcheurs. Sur de petits tabourets en plastique, une rangée d'hommes épars s'étire le long du cimetière d'écume, leurs cannes à pêche plantées dans le sable.
J'attends un peu. J'hésite.
C'est plus facile de faire semblant de regarder l'étendue bleue que d'aller parler à un inconnu. Finalement je prends sur moi. Ou plutôt: ma curiosité prend le pas sur moi.
Vous pêchez quoi? - Un peu de tout.
Il me sourit, étonné.
Depuis le pont déjà je l'ai vu. Il aurait été difficile de ne pas le voir je dois dire, ce point rouge, cette tache de couleur vive sur le gris plat des routes et des ponts et des immeubles et du ciel de ce jour-là, le 14 septembre 2015.
Je donne la date mais elle n'a pas d'importance autre que de poser la scène, que de vous aider à mieux la voir, cette tache rouge dans la grisaille d'un après-midi d'orage entrecoupé d'éclaircies.