Ce jour -là
Un jour de mars à l’orée du printemps, je suis rentrée chez moi avec une plaque de plafond sous le bras.
Je revenais de chez D., des murs couverts de couleurs, une vigne taillée en bonzaï qui peut-être donnera une grappe à l’automne et un vélo dans la salle de bain. Les volets bleu-gris claquaient dans le vent. Les derniers relents de la tramontane.
Son jazz m’a suivie dans la rue, Miles, Ray et Louis Armstrong. La trompette sur la ville, le soleil dans les yeux, l’été sur l’horizon. Le plâtre se délitait, miettes sur mon écharpe, ma veste et les pointes de mes cheveux. Du blanc.
Ce carré de plafond pesait sous mon aisselle gauche, quelques kilos difficiles à tenir ; côté rue le plâtre nu, un petit crochet, un numéro ; tout contre moi son trésor.
Qui pouvait savoir que ce jour de mars, à l’orée du printemps, je transportais dans les rues une œuvre d’art ?